Ce mémoire propose d’étudier la figure de Pierre Ayrault (1536-1601), jurisconsulte et humaniste angevin du second XVIᵉ siècle, dont l’œuvre s’inscrit dans le contexte troublé des guerres civiles et confessionnelles. À travers l’analyse de ses traités, plaidoyers et discours, il met en lumière l’évolution et la transformation de la rhétorique humaniste angevine face aux « malheurs du temps », c’est-à-dire aux guerres de Religion. Ces écrits révèlent un usage stratégique de la rhétorique comme outil d’action politique et de persuasion, traduisant les tensions entre fidélité à la monarchie, affirmation de l’autorité paternelle et défense de la paix civile dans un royaume fracturé. Pierre Ayrault parvient néanmoins à se forger un réseau intellectuel et éditorial, en s’entourant d’imprimeurs influents, en échangeant avec de grandes figures érudites et en multipliant les dédicaces stratégiques. Cette démarche lui permet de s’inscrire parmi les savants de son temps et au sein de la Respublica litteraria. Ses choix d’écriture et de publication, parfois sous couvert d’anonymat, traduisent une véritable posture politique et un engagement intellectuel. L’écriture est alors envisagée comme une action politique, révélant à travers ses textes un modèle de gouvernement guidé par la raison, la justice et la modération. Pierre Ayrault apparaît ainsi comme un acteur singulier de l’humanisme tardif, illustrant la capacité des juristes de province à conjuguer érudition, engagement civique et adaptation aux bouleversements de leur temps.
This dissertation examines the figure of Pierre Ayrault (1536–1601), a jurisconsult and humanist from Anjou, whose work is rooted in the troubled context of civil and religious wars. Through the analysis of his treatises, pleadings, and speeches, it highlights the evolution and transformation of Angevin humanist rhetoric in response to the “misfortunes of the time,” namely the Wars of Religion. His writings reveal a strategic use of rhetoric as a tool of political action and persuasion, reflecting the tensions between loyalty to the monarchy, the affirmation of paternal authority, and the defense of civil peace in a fractured kingdom. Nevertheless, Ayrault succeeded in building an intellectual and editorial network, surrounding himself with influential printers, exchanging with leading scholars, and multiplying strategic dedications. Writing is thus understood as a form of political action, revealing through his texts a model of government guided by reason, justice, and moderation. Pierre Ayrault therefore emerges as a distinctive figure of late humanism, illustrating the ability of provincial jurists to combine erudition, civic engagement, and adaptation to the upheavals of their time.