Introduction La période périnatale représente une transition psychique majeure pour les deux parents. Si la dépression du post-partum maternelle est largement étudiée, la dépression paternelle reste sous-diagnostiquée malgré une prévalence estimée à 10% dans la littérature internationale. En France, un défaut de données est actuellement observé concernant l'exploration de la symptomatologie dépressive chez les pères et la validation d'échelles de dépistage adaptées. Cette étude vise ainsi à évaluer si l’utilisation de l’échelle EPDS (Edinburgh Postnatal Depression Scale) en période postnatale immédiate permettrait une détection de la dépression paternelle, confirmée par une évaluation clinique standardisée.
Sujets et Méthodes Nous avons réalisé une étude observationnelle transversale auprès de 163 pères recrutés en suites de couches, avec évaluation systématique par l'échelle de dépression postnatale d'Édimbourg (EPDS) et le questionnaire sur la santé des patients (PHQ-9). Un sous-groupe de 100 pères a également bénéficié d'un entretien clinique structuré selon le MINI (Mini International Neuropsychiatric Interview) pour validation diagnostique. Des analyses statistiques descriptives et factorielles ont permis d'explorer la prévalence, la structure symptomatologique et les facteurs associés à la détresse paternelle.
Résultats La prévalence des symptômes dépressifs s'élève à 9,8% selon l'EPDS (score ≥10) et 23,9% selon le PHQ-9 (score ≥5), avec une corrélation modérée entre les deux échelles (r=0,547). L'analyse factorielle révèle une structure tridimensionnelle de l'EPDS (émotionnelle/instinctuelle, cognitive, anxieuse) particulièrement sensible aux manifestations anxio-dépressives paternelles, tandis que le PHQ-9 présente une structure bidimensionnelle (somatique, cognitivo-émotionnelle) plus adaptée aux symptômes somatiques. Plusieurs facteurs de risque ont été identifiés : primipaternité, jeune âge, grossesse non planifiée et complications obstétricales. Le diagnostic d'épisode dépressif caractérisé par entretien structuré (1%) contraste avec les taux supérieurs identifiés par auto-questionnaires, suggérant une possible inadéquation des critères diagnostiques standards.
Conclusion Notre étude confirme l'importance d'un dépistage systématique de la dépression paternelle dès le post-partum immédiat, privilégiant l'EPDS comme outil de première intention en raison de sa meilleure sensibilité aux manifestations spécifiques de la détresse paternelle. Les résultats soulignent la nécessité d'adapter nos cadres conceptuels et nos approches évaluatives pour mieux reconnaître et accompagner la vulnérabilité psychique des pères, désormais reconnue comme enjeu majeur pour le bien-être familial et le développement de l'enfant.
Introduction The perinatal period represents a major psychological transition for both parents. While maternal postpartum depression has been extensively studied, paternal depression remains under-diagnosed despite an estimated prevalence of 10% in international literature. In France, there is currently a lack of data regarding the exploration of depressive symptomatology in fathers and the validation of appropriate screening tools. The aim of this study is to assess whether the use of the Edinburgh Postnatal Depression Scale (EPDS) in the immediate postnatal period can detect paternal depression, as confirmed by standardized clinical assessment.
Subjects and Methods We conducted a cross-sectional observational study of 163 fathers recruited in postpartum care units, with systematic evaluation using the Edinburgh Postnatal Depression Scale (EPDS) and the Patient Health Questionnaire (PHQ-9). A subgroup of 100 fathers also underwent a structured clinical interview according to the MINI (Mini International Neuropsychiatric Interview) for diagnostic validation. Descriptive and factorial statistical analyses were used to explore the prevalence, symptomatological structure, and factors associated with paternal distress.
Results The prevalence of depressive symptoms was 9.8% according to the EPDS (score ≥10) and 23.9% according to the PHQ-9 (score ≥5), with a moderate correlation between the two scales (r=0.547). Factor analysis revealed a three-dimensional structure of the EPDS (emotional/instinctual, cognitive, anxious) particularly sensitive to paternal anxio-depressive manifestations, while the PHQ-9 presented a two-dimensional structure (somatic, cognitive-emotional) more adapted to somatic symptoms. Several risk factors were identified: first-time fatherhood, young age, unplanned pregnancy, and obstetrical complications. The diagnosis of major depressive episode by structured interview (1%) contrasts with the higher rates identified by self-questionnaires, suggesting a possible inadequacy of standard diagnostic criteria.
Conclusion Our study confirms the importance of systematic screening for paternal depression from the immediate postpartum period, favoring the EPDS as a first-line tool due to its better sensitivity to specific manifestations of paternal distress. The results highlight the need to adapt our conceptual frameworks and evaluative approaches to better recognize and support the psychological vulnerability of fathers, now recognized as a major issue for family well-being and child development.